Hommage à Arthur Honegger

ouverture pour chœur et ensemble instrumental opus 68

Compositeur: Julien-François Zbinden
Auteur texte: Texte de Henri Naef, Sérénité, tiré du « Poignard contre soi » (Editions de la Promenade, La Chaux-de-Fonds, 1945)
Date de composition: 1983
Durée: 11'
Instrumentation: 2 (pte Fl.). 1(C.A.). 2(Cl. B.).1. – 1.2.1.0. – T. – 2 Perc. – Ch. mixte – Piano – Célesta – Clavitimbre (Glockenspiel à clavier) – 1 Vlle – 1 Cb.
Commande: Radio Suisse Romande, pour le 75e anniversaire du Théâtre du Jorat, Mézières

Création
Date: 2 septembre 1983
Lieu: Théâtre du Jorat à Mézières
Interprète(s): Choeur Pro Arte Lausanne, Choeur de la Radio Suisse Romande, Orchestre de Chambre de Lausanne, André Charlet (direction)


Note

A la fin du mois de juin 1983, lorsque la Radio-Télévision Suisse Romande me proposa d'écrire une oeuvre brève à l'intention du concert donné au Théâtre du Jorat pour marquer son 75ème anniversaire le 2 septembre de la même année, l'envie fut aussi grande que le vertige. Certes, le délai était particulièrement court, mais l'occasion était belle. Faisant taire mes hésitations afin de ne pas perdre davantage de ce temps si parcimonieusement compté, j'acceptais. Néanmoins, un problème rendait ma tâche assez difficile, à savoir l'obligation d'utiliser tout ou partie de l'instrumentarium employé par Honegger dans le Roi David, pièce maîtresse du concert-anniversaire. C'est la raison pour laquelle je demandais de pouvoir utiliser le chœur. Et c‘est ainsi que j’optais pour la forme d‘une ouverture. On sait que d‘ordinaire les ouvertures ont un titre. Pourtant, là n’est pas la raison de celui que j’ai choisi : Hommage à Arthur Honegger.

Après avoir rendu hommage à beaucoup de musiciens qui ont enchanté mon oreille et mon cœur – de J.-S. Bach à Ravel, en faisant un détour dans le monde du jazz, de Gershwin à Duke Ellington en passant par Earl Hines et Louis Armstrong – il en manquait un à mon catalogue et sûrement le plus important. Ma jeunesse s’est nourrie de l‘impressionnisme français, puis de Strawinsky et de Bartòk, mais la quarantaine m’a rapproché de plus en plus d’un musicien de notre pays que je considère comme l’un des plus grands de notre temps : Arthur Honegger. Ce qui m‘impressionne chez cet artiste, c‘est le subtil équilibre qu’il réalise entre une extraordinaire force virile et une inépuisable tendresse. C‘est ainsi qu‘il est devenu pour moi un musicien de référence, un maître à penser.

L’Hommage est une sorte de court poème symphonique en trois parties. Il débute par les lettres initiales A. H. - nom allemand des notes La et Si - que l‘on retrouve à différents endroits de la partition . La première partie, de caractère lyrique quelque fois assez passionné, sert de prélude à un Scherzo, prétexte à un discours souvent virtuose des instruments à vent, tandis que le troisième volet est consacré à un chœur final. Qui dit chœur dit, dans la plupart des cas, texte. La difficulté était d’en trouver un qui puisse convenir à la brièveté de l’œuvre ainsi qu'à la circonstance. En 1946, j‘avais écrit quatre mélodies tirées d‘un recueil intitulé Détresse en Paradis dû au poète Henri Naef . Né an 1889 à Genève, où il décéda en 1967, Henri Naef fut également historien de grande réputation. Son action en faveur des traditions, coutumes et costumes, du Heimatschutz, et surtout son amour de la terre fribourgeoise, et plus particulièrement de la Gruyère où, dès 1923, il devint l’âme du Musée gruérien de Bulle, forcent le respect et l’admiration. C‘est en relisant son œuvre poétique en trois parties Le Poignard contre soi, paru en 1945, que je découvris, dans le tome deux, le très beau poème Sérénité dont la force et la simplicité me semblèrent merveilleusement convenir à l‘atmosphère du Théâtre du Jorat. Enfin, une oreille attentive reconnaîtra, au cours de l’œuvre, quelques discrètes allusions à des pages du grand Arthur, qu‘il voudra bien, de là-haut, me pardonner, je l‘espère, dans un sourire paternel et fraternel.