1951

Jeanne Bovet (1915-2010)
pianiste

Jeanne Bovet

Un événement assez exceptionnel présida à la rencontre de Jeanne Bovet. Le 28 décembre 1951 à Radio-Lausanne, JFZ est chargé de la régie musicale d'un enregistrement des Variations symphoniques pour piano et orchestre de César Franck avec l'Orchestre de Chambre de Lausanne. Le chef – un artiste que l'on s'attendait à voir devant son clavier plutôt que sur le podium – se nomme Alfred Cortot. Au piano, l'une de ses brillantes élèves : Jeanne Bovet. JFZ se souvient avec émotion de la conduite ample et inspirée de Cortot (notamment les premières mesures tragiques de l'orchestre) et de la réponse sensible et délicate de Jeanne Bovet au piano. Après cette exécution historique s'écoule un demi-siècle…

Jeanne Bovet et son amie Raphaële Lépine recherchaient un lieu où donner des concerts dans un esprit de total recueillement. En 1965, elles découvrent en France, dans la commune du Vieux Rompon en Ardèche, une chapelle abandonnée et ses dépendances en ruines. La commune leur vend ce bien-fonds. Elles restaurent le domaine qui s'appellera Le Prédicant et y organisent, de Pentecôte à mi-septembre, une série de concerts annuels. Entreprise devenue trop lourde pour ces deux femmes pourtant courageuses, elles fondent, en 1985, l'Association de l'Offrande musicale dont un comité et les membres cotisants reprendront une partie des charges et responsabilités. À noter que chaque concert commence et finit par une pièce de J.-S. Bach jouée au piano par Jeanne et que les exécutions sont exemptes d'applaudissements.

En 2000, Jeanne Bovet informe JFZ de l'exécution de l'une de ses œuvres. Le compositeur avait souvent entendu parler du Vieux Rompon, notamment par la violoniste Anne-Marie Gründer qui l'avait encouragé à s'y rendre. Imprudemment, mais par courtoisie, envoie son album JFZjazz. Jeanne n'aura de cesse que le pianiste participe, dans un récital de musique de jazz, aux concerts de l'Offrande musicale qui ont lieu le samedi soir et répétés le dimanche après-midi. Ainsi, en 2001 et 2003, JFZ se produira en concerts comportant des improvisations sur des standards de jazz. Comme JFZ le prévoyait, jouer de la musique de jazz seul au piano sans réaction du public serait une épreuve particulièrement éprouvante. Il assortit donc sa prestation d'un petit loto, animé par Pascale Juillerat, épouse de son filleul Tristan, consistant à donner aux participants à tirer au sort les titres des morceaux à interpréter.

Le Comité demanda à JFZ de composer une œuvre pour piano à l'intention de Jeanne Bovet afin de marquer son 90ème anniversaire. Elle eut pour titre Trois inventions à mi-voix op 99. Jeanne en fut bien évidemment l'interprète le 18 décembre 2005 à Rompon. Il faut préciser que Jeanne avait accordé une amitié quasi filiale au compositeur en dépit du fait que les intéressés soient contemporains à deux ans près… De 2001 à 2011, JFZ se rendit chaque année au Vieux Rompon. Jeanne avait décidé, contre l'avis du compositeur, d'inscrire l'une de ses œuvres à chaque saison ; était-ce un malicieux stratagème pour s'assurer de sa présence…? Vieux Rompon : émouvante et enrichissante part de vieillesse.